Parlons un peu d'un auteur
que j'adore , il s'agit de Yves Simon qui
fut également journaliste dans la revue "Actuel " dans les années 70 et qui
embrassa avec succès une carrière de chanteur à partir de 1973 (souvenez vous
de "Au pays des merveilles de Juliet" ou encore "les
gauloises bleues","Amazoniaque",sans oublier
"Diabolo menthe" la BO du film de Diane Kurys )
L'écrivain Yves Simon est tout aussi
remarquable ,une écriture ciselée et précise qui lui valut (à juste titre)
d'obtenir en 1988 pour son roman" Le Voyageur magnifique", le prix
des Libraires , et pour "La Dérive des sentiments", le
prix Médicis en 1991 . Après avoir adoré "le prochain amour" je vous
recommande chaudement son petit dernier intitulé " Les éternelles" une histoire d'amour passion proposée comme un
"chassé croisé "entre deux
couples .
extrait
"Je me suis adonné à une drogue dure pendant vingt-huit mois.
Vingt-huit mois et dix jours très exactement. Je fis deux tentatives
infructueuses pour interrompre le processus de décomposition qui avait atteint
mon corps et mon esprit. N'écrivant plus, ne sortant plus, je fus terrassé par
mon héroïne, ma maladie. La troisième et dernière tentative fut la bonne. Ma
décision fut prise en un éclair car je venais d'apercevoir la mort me tendre la
main, doucereuse, une garce avenante qui voulait m'étreindre pour de bon, avec
des baisers à pleine bouche. Et moi je voulais vivre encore, sur une terre
qu'il me fallait reconquérir tant j'avais tout délaissé, amis, écriture,
espérances, pour naviguer dans un ciel de mitraille. Connaître enfin la
rémission et la douceur des jours. Le manque, la privation, c'est alors que les
souffrances se sont manifestées. Métastasiques et vénéneuses, elles se sont
mises à germer dans la tête, le foie, le sexe, petites pousses de fiel qui font
éclater la peau, même les paupières pour qu'il n'y ait plus de ciel à voir. Ni
étoiles ni lait de lune, que le sombre de la nuit. J'étais une tempête, ça
brûlait et je pleurais. Epuisé de partout je pensais évidemment à elle, aux
extases, elle, l'initiatrice de la douleur, elle comme une araignée aux tentacules
pourpres qui prenait la place de mes ravissantes ramifications nerveuses, mon
système avec neurones et synapses, le point faible des sensibles. Je dus
renouer avec des confidents, avec le docteur Chestonov en qui je n'avais qu'une
confiance relative, avec le barman du Paradise qui me concoctait des Acapulco
au mezcal afin de me redonner espoir. Alcools blancs glacés, sans parler des
havanes, les amis du rien, quand la tête est vide et qu'il suffit d'aspirer
pour se sentir vivant. Et toujours le suave Lexomil, avec son tube
vert-espérance, paravent des estropiés du cœur et de la mémoire. Apaisé,
certains matins, je pris le train pour un aller-retour vers la mer et, le soir,
grisé de large, je m'en revenais vers l'étroit. Alors, au creux de la nuit, j'appelais
Walser le confident attentif, l'ami cher qui avait toujours su trouver une
parade à l'héroïne, par la parole et des mots absents au dictionnaire du
désespoir. "
à découvrir absolument , surtout si tout comme moi vous aimez Ernest Hemingway
et Christian Bobin ,car il y a chez Yves
Simon une athmosphère digne d'un Hemingway (c'est pas rien quand même ..et
je le pense sincèrement) et la précision , la justesse du verbe et des lieux
décrits comme sait si bien le faire (et depuis longtemps) Christian Bobin .
Seriez d’accord pour que je
parle dans le prochain billet du Magicien OX, de la carrière de chanteur d’Yves Simon ?
A bientôt !!